View in

English

L’outil CARA du CERN permet de générer des données précieuses sur les mécanismes d’infection virale

Une modélisation précise des taux d’infection virale dans les espaces intérieurs a fait l’objet d’un article publié dans une revue scientifique à comité de lecture

|

CARA graphs
(Image: CERN)

Le CERN est connu pour être le plus grand laboratoire de recherche du monde en physique des particules, mais les travaux qui y sont menés ne se limitent pas à cette discipline et couvrent une grande diversité de domaines. L’outil CARA du CERN, logiciel permettant d’évaluer le risque de transmission aéroportée du COVID-19, est un brillant exemple du bénéfice que peuvent apporter à la société les recherches menées par le CERN, au-delà de la mission principale du Laboratoire. L’outil, qui évalue le risque de transmission du COVID-19 dans les espaces clos en modélisant le profil de concentration de virus selon des paramètres variables, a récemment été présenté dans un article publié dans un numéro spécial de la revue de la Royal Society, « Interface Focus ». L’article, qui contient des données très précieuses, constitue une ressource appréciée pour la prise de décision en matière de politiques sanitaires ou de gestion des espaces.

Développé en 2020 par Andre Henriques, spécialiste de l’unité Santé et sécurité au travail et protection de l’environnement (HSE) du CERN, le logiciel était conçu initialement comme une solution pratique au casse-tête du partage des bureaux par temps de pandémie. En faisant varier divers paramètres, tels que port du masque, ventilation, volume de la salle et durée d’exposition, les responsables de la gestion des espaces et les délégués à la sécurité ont pu évaluer si les mesures de base en place garantissaient un niveau de risque acceptable et étaient adaptées à un lieu de travail donné, ce qui a permis d’affiner les mesures générales du CERN en matière de santé publique. Mais ce qui n’était au départ qu’un outil orienté utilisateur a rapidement pris de l’ampleur pour devenir un instrument utilisé dans des domaines tels que l’immunologie et l’infectiologie.

« Le modèle que nous avons initialement développé était plutôt prudent et sa précision, bien que suffisante pour permettre une prise de décision éclairée, était limitée du fait du manque d’expertise pertinente de notre équipe dans le domaine des sciences de la santé. C’est dans ce contexte que des experts de l’OMS ont rejoint l’aventure », explique Andre Henriques. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a invité le CERN à siéger au sein d’ARIA, un groupe de travail international chargé de l’élaboration de normes en matière de transmission aéroportée d’agents pathogènes respiratoires. Grâce à la participation de spécialistes du monde entier, les capacités de modélisation de l’outil ont été optimisées et affinées, et le processus a mené à la publication de l’article d’Interface Focus.

L’outil ainsi perfectionné, grâce à l’apport des sciences de la santé, ses modèles ont pu être confrontés avec succès à des données cliniques mais aussi à des données d’épidémies, comme le montre l’article. La modélisation précise de CARA en fonction de divers paramètres a notamment permis de confirmer l’importance des super-émetteurs dans la transmission aéroportée : ces personnes, qui ne représentent que 20 % des hôtes infectés, émettent jusqu’à cent fois plus de particules porteuses du virus. Le logiciel a également produit de nouvelles données permettant de confirmer l’efficacité du port du masque, ainsi que de la ventilation.

home.cern
Les différents graphes représentent le profil de concentration de virus dans l'air au cours d'une journée de travail, pause-déjeuner d'une heure comprise. On peut visualiser la probabilité relative d'infection en comparant entre elles les aires au-dessous de chaque graphe : plus l'aire est grande, plus le risque de contamination est élevé. (Image tirée de l'article scientifique d'Interface Focus)

Si l’on compte la participation de l’unité HSE du CERN, ainsi que des départements Physique expérimentale (EP), Faisceaux (BE) et Technologies de l’information (IT) – sans oublier les spécialistes du groupe de travail ARIA – les efforts et les ressources mobilisés pour développer la technologie et analyser ses données ont été considérables. « Nous disposons d’un modèle plus précis que jamais qui, de plus, bénéficie également d’un large soutien de la communauté scientifique. Ce point était très important pour moi car, malgré les compétences pointues de l’équipe CARA du CERN, il fallait la validation de spécialistes des sciences de la santé pour assurer à l’outil CARA une reconnaissance à plus grande échelle », déclare Andre.

Fort de son architecture open-source, de son accessibilité et de sa simplicité d’utilisation, le logiciel est désormais utilisé par différentes organisations dans le monde.